Monnaies en métal de cloche

Monnaies en métal de cloche

Après à la Révolution française, le manque de métal pour la fabrication des monnaies et des canons se fit sentir. Pour ce faire, il fut décidé de décrocher les cloches des églises et des cathédrales pour palier à ce manque. Plus de 100 000 cloches furent fondues. Dans les clochers, il fut décidé de fondre en priorité les cloches abimées et celles en grand nombre, car il semblait indispensable qu’il reste des cloches pour donner l’heure.

Quelques monnaies furent fabriquées avec ce nouvel alliage. Une loi du 6 aout 1791 ordonna de mélanger à parts égales du cuivre et le métal de cloches. Le procédé de fabrication du métal de cloche a fait l’objet d’une instruction officielle datée du 18 septembre 1791. A l’origine, cette instruction était destinée aux ateliers monétaires et apportait les solutions permettant de résoudre les problèmes posés par cet alliage hors normes. Certains passages ressemblent cependant plus à une recette de cuisine qu’à un rigoureux procédé scientifique.

Ainsi, “Pour fondre ce mélange avec facilité, il ne faut d’abord mettre au creuset que la moitié de la matière qu’il

doit contenir ; et lorsque cette moitié sera en pleine fusion, on doit jeter sur la surface du bain environ deux onces d’un flux composé de deux livres de sel ammoniac, et quatre livres de résine, bien pilés ensemble, auxquels on ajoutera huit onces environ de poussier de charbon bien pilé et bien sec. L’effet de ce flux est de rendre la matière ductile, en empêchant la calcination qui aurait lieu, sans cet intermède, par le seul contact de l’air sur la surface du métal en fusion.

On remettra ensuite l’autre moitié de la fonte préparée, et lorsque le tout sera en parfaite fusion, on réitérera la même dose du flux indiqué ; après quoi on brassera avec célérité et on coulera dans les moules.”

Il y eu donc des deniers à l’effigie du roi Louis XVI mais aussi des « sols » avec la table de loi et la balance de la justice jusqu’à la création d’un nouveau système décimal.

Monnaie de 3 deniers en métal de cloche 1792 BB = Strasbourg

Monnaie de 6 deniers en métal de cloche 1792 (l’an 4 ) BB = Strasbourg

Monnaie de 12 deniers en métal de cloche 1792 A = Paris

Monnaie de 1 sol au la balance en métal de cloche 1793 AA = Metz

Monnaie de 2 sols à la balance 1793 I = Limoges

Le décret rendu par l'Assemblée nationale le 2 novembre 1789 qui met tous les biens ecclésiastiques à la disposition de la Nation, forme la base de la série des lois révolutionnaires à la suite desquelles la spoliation des églises s'est accomplie d'une manière aussi complète que regrettable. C'est à partir de cette période que les révolutionnaires les plus anticléricaux firent pression pour détruire ce patrimoine. Voici un exemple de lettres rédigés par des citoyens zélés à leur député : Idée d'un citoyen patriote sur la suppression des cloches des paroisses de Paris :

Pillage d'une église en 1793

huile sur toile de Victor Henri Juglar, vers 1885, musée de la Révolution française.

Le clocheton sans cloche de la chapelle St Hernot de Crozon en Bretagne

Nos aïeux tenaient à leurs cloches, qui souvent avaient été fondues sur la place du village, qui avaient été bénies lors d'une cérémonie solennelle et populaire. Des incidents frôlant l'émeute se produisirent en maints endroits ; aussi, dans de nombreux cas, des cloches furent décrochées discrètement et cachées dans un tas de fumier ou enterrées dans un lieu sûr.

Certaines cloches durent leur salut au fait qu'elles étaient inaccessibles. Vu le désordre qui régnait quelquefois sur les lieux de regroupement et qui provoquait de véritables embouteillages de charrettes, il arrivait que l'une d'entre elles, après enregistrement du contenu, repartait avec quelques cloches enfouies sous divers matériaux !

Dès la date de la signature du Concordat le 8 avril 1802, des tractations commencèrent pour réinstaller des cloches dans les édifices ouverts au culte. La reconstitution du patrimoine campanaire se fit lentement, étant donné l'existence d'autres urgences pour la population et peut-être par manque de cuivre absorbé par les arsenaux de l'Empire ; le véritable repeuplement des clochers ne se fit cependant que sous le Second Empire et la IIIe République.

Ces monnaies avaient la particularité d’avoir un aspect un peu rugueux et un son particulier quand elles tombaient sur un sol dur. Cela venait de cet alliage peut commun de cuivre de bronze et d’étain mais l’expression « monnaies sonnantes et trébuchantes » ne vient pas de cette période. En effet, cela remonte au Moyen Age. A l’époque, pour s’assurer que les monnaies n’étaient pas fausses, il fallait d’abord vérifier la qualité de leur alliage. On écoutait donc le bruit qu’elles produisaient en les laissant tomber sur une surface dure.

Jean-Paul FARGEAS

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